Construire un tiers-lieu : un projet qui fait sens à l'issue de cette longue période passée en télétravail. Mais comment cela se met en place ? Il existe en effet autant de façons de faire que d’initiatives. Lumière sur les procédés.

Attention, cet article n’est pas destiné à être un guide pratique de la création des tiers-lieux, mais plutôt un panorama de l’existant, réalisé suite à de nombreux sondages de la Coopérative des Tiers-Lieux après de gestionnaires ou de monteurs de projets.

Amorçage de l’initiative

Le projet doit être solidement construit pour convaincre les acteurs locaux et les futurs utilisateurs. Pour cela, le business model et les différents plans de financement, ainsi que les aspects juridiques, doivent être étudié avec soins. Les questionnements font le fil directeur de la création. Voici les principales questions que se sont posé les porteurs de projets :

1° Où créer son tiers-lieu ?

• Territoire rural : espaces structurants, allant des petits commerces au café de proximité. Ils jouent sur la fidélisation pour redynamiser les zones rurales et créer des liens et de l’activité
• Territoire péri-urbain : tiers-lieux de proximité, pour limiter les déplacements pendulaires des travailleurs périphériques vers les villes
• Territoire urbain : tiers-lieux métropolitains qui ont un fort flux de passage, et sont un bons compromis face à la pression foncière

2° Avec qui ?

Il est très difficile de travailler seul. Pour créer un tiers-lieu dynamique, savoir s’entourer peut être un véritable atout. C’est important que l’équipe partage des motivations communes :

• Collaboration
• Lien social
• Expérimentation
• Mutualisation

La bienveillance permet de constituer un réseau de confiance. Un collectif d’utilisateurs fera, lui, émerger un processus bottom-up (procédure hiérarchiquement ascendante : des utilisateurs vers les gestionnaires).

3° Quel portage ?

• Privé : par une société privée ou un collectif/association
• Mixte : en associant la collectivité locales, les associations et les privés
• Public : via les collectivités locales
• Une gouvernance partagée peut aussi être étudiée comme pratique spécifique

4° Quel statut juridique ? 

Le statut juridique est fondamental lors de la création. En effet, selon le statut, le projet ne pourra pas forcément prétendre aux mêmes aides financières ou structurantes. Un changement de statut peut s’opérer ; mais les conditions peuvent parfois être lourdes. Le statut dépend également de l’état d’esprit que vous souhaitez insuffler dans votre espace.

• SARL SAS
• SCI
• Coopérative (SCOP, SCIC)
• Association
• Collectivité locale

5° Quelle source de financement ?

Pour que le tiers-lieux soit pérennisé dans le temps et financièrement autonome, il convient de bien choisir quelles seront les sources de revenus.

On distingue l’économie « classique » :

• Location d’espace (bureaux, salles...)
• Cotisations et adhésions
• Formations et ateliers
• Evènements extérieurs
• Vente de produits (bar, restaurant, fablab...)

Et l’économie « contributive »

• Contribution des utilisateurs
• Crowdfunding
• Contributions d’extérieurs (mécénat)

6° Quel est le rôle des acteurs publics dans mon projet ?

Plusieurs possibilités :

• Pas d’intervention
• Mise à disposition de locaux (gratuite ou à tarifs préférentiels)
• Relais de communication
• Aide au lancement (ESS, développement durable, innovation...)
• Prise en charge des bureaux loués par les télétravailleurs
• Soutiens ponctuels (évènement, partenariats)
• Gestion et animation du lieu

Lancement du projet

Après cette première phase de préparation et de réflexion, il est temps de lancer le projet, en se concentrant sur les futurs utilis’acteurs du lieu et son fonctionnement.

7° Pour quel public ?

• Indépendants, microstructures
• Entrepreneurs agiles
• Etudiants
• Demandeurs d’emplois
• Cadres itinérants
• Artistes
• Porteurs de projets
• Chercheurs
• Artisans
• Télétravailleurs et salariés
• Tous types d’utilisateurs

8° Quelle sera la thématique du lieu ?

Avoir une thématique permet de toucher une cible concrète et identifiée, et de répondre parfaitement à leurs attentes tout en organisant une communication et programmation cohérente. Attention tout de même à ne pas se refermer sur soi ou sur une thématique trop définie : cela pourrait limiter la diversité des rencontres, qui est la force du tiers-lieu. Il faudra cependant prendre garde au décalage culturel avec les publics.

• Numérique
• Communication
• Culturel
• Développement durable
• Artisanat
• Art
• Métiers de la ville

9° Quel type de tiers-lieu ?

Il en existe une multitude. Le risque majeur est d’en faire un lieu sans « vie », comme une simple colocation de bureaux/Centre d’affaires/télé centre. Ces domaines annihilent complètement l’esprit collaboratif prôné par les tiers-lieux. Les bonnes pratiques sont plutôt des modèles mettant en avant la collaboration et le « faire ensemble » :

• Espace de coworking
• Ateliers partagés
• Hackerspace
• Fablab

Création du lieu

Maintenant que l’on a bien les idées en tête pour notre projet, on se concentre sur la dimension physique : le lieu, son aménagement, et l’aspect pratique

 10° Dans quel lieu ?

La question foncière est l’une des plus épineuses pour les tiers-lieux en projet. On peut solliciter les acteurs locaux pour être aidé dans cette thématique, mais les tiers-lieux ont souvent eu vocation à « combler » le foncier en transition. Devant un réel besoin de sédentarisation et la popularisation du modèle, on relève de plus en plus de lieux « adaptés » pour lui correspondre :

• Lieu déjà « programmé » (bureaux ou ateliers aménagés)
• Lieux « transformés » (maisons d’habitations, commerces, café...)
• Lieux « reconquis » (cinéma, friches industrielles, universités,  espaces publics...)
• Lieux devenus « partagés » (gare SNCF, bureaux de poste...)

11° Combien de m² ?

Il n’existe aucune réponse concrète à cette question, puisque les m² dépendront de votre propre idée du tiers-lieux et de son organisation. Cependant, pas besoin d’avoir un foncier trop important ; c’est davantage l’esprit définit le lieu. Bien évidemment, il faut garder en tête que l’espace peu être modulable.

Cependant, il existe 3 « étapes » pour réussir à trouver la bonne surface :

1. Définir selon le potentiel estimé d’utilisateurs à l’intuition, sans étude de besoin
2. Définir selon le potentiel avéré d’utilisateurs, qui intervient à la suite d’une prospection et d’une étude des besoins
3. Définir un chiffrage en se basant sur la donné suivante : 10m²/utilisateur tertiaire

12° Quel aménagement ?

Encore une fois, il n’existe pas de réponse ferme à cette question ; cela dépend de l’idée que vous vous faites de votre tiers-lieux. N’oubliez pas également que votre espace gagne à être modulable. Voici  quelques pistes d’aménagements récurrents et essentiels selon les utilisateurs :

• Postes de travail (bureaux fermés/openspace)
• Espace de vie collective
• Espace de création
• Isoloirs
• Espace détente
• Espace vide

13° Quels équipements

Il existe des équipements obligatoires, qui suivent les normes en vigueurs :

• Extincteurs
• Trousse de secours
• Accès handicapé

On relève aussi des équipements de 1^ère nécessité :

• Bureaux
• Connexion internet
• Machine à café
• Salle de réunion
• Cuisine partagée

Puis des équipements de 2^nde nécessité :

• Ecrans
• Imprimante
• Vidéoprojecteur
• Imprimante 3D
• Visio
• Parking
• Salle de jeux
• Douche

14° Quels services de proximité ?

Pour le bien-être des occupants, il convient également de réfléchir aux différents services à proximité de votre tiers-lieux. Bine qu’ils ne soient en rien obligatoires, ces commerces de proximité participerons très efficacement à la vie de votre espace

• Bars
• Restaurants
• Marché / supermarché
• Epicerie
• Poste
• Tabac / presse
• Crèche/ école / garderie

15° Comment se rendre dans l’espace ?

Il est également important que votre espace puisse être facilement accessible, ou à proximité d’une gare-relais. Les modes de déplacements les plus utilisés sont :

• La voiture / moto
• Le vélo
• La marche
• Le train
• Le bus / tramway

Dès lors, il peut être intéressant d’avoir à proximité :

• Un parking-relais (vélo, trottinette...)
• Un garage à vélo
• Des places définies et réservées

Voila pour cette première partie de l’infographie : comment créer un tiers-lieu ? Par la coopérative des tiers-lieux.

Le mois prochain, nous poursuivrons les billets en nous axant sur la gestion, l’animation et l’ancrage de ces espaces.